Intime conviction, écoute : il est grand temps pour vous, amis lecteurs, de développer votre capacité d'innovation. L'expert, invité par le « Blog 16h44, La Minute du Manager », après avoir formé les plus grands dans ce domaine, propose une méthode simple et dépouillée. A mettre en œuvre avec vos clients au plus vite.
CHRONIQUE : Formateur de plusieurs générations de consultants dans le domaine de l'entreprise innovante (intervenant HEC, séminaire des docteurs en sciences du CEA,..), Alain JEZEQUEL est reconnu pour son expertise du développement de la PME.
Nombreux sont les territoires, les dirigeants de PME, et les patrons de grands groupes dont les projets ont vu leur trajectoire infléchie par ses conseils avisés, souvent discrets, mais toujours marquants. Dans cette interview, il nous emmène à la découverte des voies de l'évidence, grâce à une approche moderne et innovante de l'innovation.
Alain, vous avez une conception simplificatrice de l'innovation. Quelle est-elle ?
Ma conviction, c'est que pour des innovations efficaces et réussies, il faut simplifier à l'extrême le processus. Cette approche repose sur plusieurs idées simples et fortes, observées au cours des années.
L’idée numéro un est la suivante : contrairement à ce que l'on pense, tout le monde ne peut pas être acteur de l'innovation. Il existe des centaines d’inventeurs indépendants qui se croient géniaux. L'innovateur efficace est lui, un spécialiste de son secteur (un mécanicien a toujours tendance à penser que l'informatique est très facile et réciproquement) mais la maîtrise en profondeur d'un métier n'est jamais simple.
Quant à l’idée numéro deux, elle s’articule sur la différence fondamentale entre l'innovation de rupture et l'innovation incrémentale. L'innovation de rupture est presque toujours issue de la recherche fondamentale. Elle demande de gros moyens pour être exploitée et à la fin, les grands acteurs raflent la mise. C'est sur l'innovation incrémentale que vous, dirigeants, pouvez concentrer efficacement vos efforts, grâce à un processus extrêmement simplifié.
De quelle nature est ce processus ?
Pour innover le dirigeant a besoin de « témoins du secteur » qui vont jouer un rôle-clé, en proposant des évolutions, des pistes liées aux besoins de l'utilisateur. Et ceci en dehors de la seule préoccupation commerciale. Ce témoin, appelons le « témoin imaginatif », dispose d'une richesse d'informations très précieuses, d'une ouverture d'esprit et d'une posture différente de celle de l'entreprise.
Qui est-ce témoin imaginatif ?
C'est souvent un client qui connaît bien les produits de votre entreprise comme consommateur ou un utilisateur. Qui soit à la fois concret et imaginatif. Cette relation avec lui va apporter bien plus que de nombreuses réunions de brainstorming, chères et souvent peu efficaces. Je ne crois plus trop à leur efficacité pour innover. Gardons-les pour résoudre des solutions à des problèmes clairement identifiés. Son importance est cruciale dans le processus. Il va guider l'entreprise par son besoin en perpétuelle évolution. Ses attentes sont souvent simples (une solution moins coûteuse, un accès plus simple, une fonctionnalité qui lui simplifie la vie quotidienne, mais cela va parfois bien au-delà).
Le témoin imaginatif aide le dirigeant à trouver des pépites. C'est une ressource simple, efficace, puissante mais, étrangement, presque jamais utilisée par les entreprises dans le domaine du b to b.
Si nous comprenons bien, le témoin imaginatif est la source des innovations les plus efficaces. Une fois l'idée détectée, comment se poursuit alors ce processus ?
Ensuite, le processus se poursuit de façon simple, avec bon sens. L'idée formalisée se mue en concept. Sa faisabilité technique donne lieu à des ajustements, puis l'industrialisation s'opère. A chaque étape, le témoin imaginatif aide l'entreprise à rester concentrée sur le vrai besoin de l'utilisateur.
Pouvez-vous nous citer un exemple ?
La mise en œuvre d'un fauteuil roulant équipé de roues plus larges à l'avant. Résultat : la possibilité pour un handicapé d'aller dans le sable et de se baigner dans la mer.
Parmi tous les accompagnements (flops et succès) que vous avez suivis, comment se fait-il qu'une démarche aussi simple fasse mouche ?
Parce que l'innovation, c'est simple....Mais une innovation réussie, ça ne se construit jamais seul. En mettant en connexion d'une part, un expert de son métier, et d'autre part, un ou des utilisateurs concernés, la magie de la relation se crée et la valeur ajoutée apparaît. Aussi parce que dans cette relation, l'intuition, le subjectif et l'intelligence concrète se combinent.
Ludiwine EVRARD et Philippe CARPENTIER