Le changement de régime vécu ce week-end en Géorgie et ceux qui impactent de nombreux pays européens confortent l’influence des partis populistes de droite, voire des partis nationalistes et toute autre forme de totalitarisme. Dans le cadre de cette approche pour le moins prononcée, n’oublions pas la récente élection du chef de fil de la droite nationaliste américaine, Donald TRUMP.
TRIBUNE : Les dernières élections européennes ont vu le Parlement de notre continent s’ancrer encore plus à droite. Deux pays de l’Union sont actuellement dirigés par l’extrême droite : la Hongrie et l’Italie. En Finlande, aux Pays-Bas et en Slovaquie, celle-ci participe à un gouvernement de coalition. De plus, en juin 2024, quelle qu’en soit la version considérée, l’ « éco-socialisme » semble avoir déjà perdu son statut éphémère de ressource politique. Le trait remarquable de la situation de la gauche européenne est la tentation du basculement vers le populisme, ce qui ouvre un boulevard pour la droite traditionnelle et l’extrême droite. On constate que ces partis s’attaquent directement à l’état de droit ! Viktor ORBAN, le Premier ministre hongrois, s’est attaqué à la justice et a nommé des juges proches du pouvoir, au Tribunal Constitutionnel. Dans les pays où le totalitarisme est aux manettes, on a noté le recul systématique des droits civils. La Hongrie a voté une loi interdisant d’évoquer l’homosexualité ou le changement de genre pour les mineurs. La gauche fait hélas pire en Chine, en Russie, en Corée du Nord…
Une dédiabolisation des partis de la droite dure et nationaliste
La montée de l’extrême droite en Europe possède également des répercussions en termes de politique étrangère. Par exemple, ces partis affichent une étiquette pro-Russe éhontée, fragilisant les positions de soutien à l’Ukraine, adoptées par l’actuelle gouvernance européenne.
Historiquement, tous ces partis ont une culture originelle antisémite, voire néonazie. Ce fut le cas du Front National qui donnera naissance au RN, annonçant fort et clair qu’il a abandonné toutes ces références controversées. Tous ces partis œuvrent pour leur dédiabolisation. Cette volonté de redorer un blason écorné par l’histoire, passe par certains médias, TV et journaux, et surtout les réseaux sociaux. Le recul progressif des partis de gauche tend à expliquer pourquoi les partis de droite semblent plus respectables, afin d’offrir des solutions simples (ou simplistes), aux problèmes socio-économiques de la société.
Le journal allemand « Der Spiegel » présente sur sa photo de couverture, en août 2024, trois personnalités politiques de premier plan : Donald TRUMP, Marine LE PEN et Björn HOCKE (ténor du parti « Alternatif » pour l’Allemagne). Ces trois personnages sont présentés comme étant d’extrême droite. « Der Spiegel » de poursuivre : « L’éventualité d’un retour au fascisme fait l’objet d’un débat sérieux ».
Pourquoi une telle progression du vote populiste ?
Pour Hannah ARENDT, célèbre politologue, philosophe et journaliste allemande, naturalisée américaine, le système totalitaire est d’abord un mouvement, une dynamique pour détruire la réalité et les structures sociales. Pour elle, c’est un mouvement « international dans son organisation, universel dans sa visée, idéologique et planétaire dans ses aspirations politiques… ». Elle écrivit cela au début des années 1970 ! Nous ne cherchons pas à décrypter les différences entre totalitarisme, fascisme, dictature, phalange, despotisme… Tous ces termes se retrouvent sur des similitudes, qui dans l’histoire, ont vu naître des tyrans comme HITLER, STALINE ou MAO et tant d’autres. Le propos n’est certes pas d’amalgamer les dirigeants d’extrême droite d’aujourd’hui avec les despotes d’hier, mais d’apporter un rappel historique qui doit éclairer notre réflexion.
Pour l’extrême droite, le déclin de l’Europe, la menace que représenteraient les transgenres, les wokistes, et une immigration incontrôlée, serait mère de toutes nos crises. Une question légitime se pose : qu'est-ce qui explique cette montée en puissance ?
Pierre VERCAUTEREN, politologue, précise : « On assiste depuis une dizaine d’années à une crise de la démocratie de manière générale ». Plusieurs points expliquent donc cette montée des partis extrêmes au sein des pays européens. « Déjà, la forte alternance de voix du spectre politique, ensuite la poussée de l'abstention lors des élections, et enfin la lassitude et la défiance grandissante de la population à l’égard des décideurs politiques ».
Les citoyens recherchent alors une alternative politique, « et c'est l'extrême droite qui bénéficie de cela depuis sept à huit ans ». Généralement, les partis de la droite dure profitent d’une crise pour prospérer. Et ces dernières années, des crises, il y en a eu beaucoup : financière, sanitaire et migratoire notamment. Et c’est précisément la crise migratoire de 2015 en Allemagne, où un million de réfugiés sont arrivés dans le pays, qui a permis le boum de l’AFD, le parti d’extrême droite de l’autre côté du Rhin. La migration, c’est aussi ce qui a poussé l’extrême droite en Italie. Il y a aussi une méfiance grandissante envers le fonctionnement de la démocratie. Enfin, ces partis changent de stratégie aujourd’hui, notamment avec Tom VAN GRIEKEN en Belgique ou Jordan BARDELLA pour le Rassemblement National en France, qui ont des têtes de « gendre idéal » et appâtent un nouvel électorat.
L’avenir est incertain mais aussi plein de promesses, restons optimistes mais vigilants, un vote ne se conduit pas sur une émotion, sur une idéologie qui pourrait nous aveugler !
« Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat n'est pas que vous croyez ces mensonges, mais que plus personne ne croit plus rien. Un peuple qui ne peut plus rien croire ne peut se faire une opinion. Il est privé non seulement de sa capacité d'agir mais aussi de sa capacité de penser et de juger. Et, avec un tel peuple, vous pouvez faire ce qu'il vous plaît. » Hannah ARENDT.
Paul GUILLON