Le nouveau gouvernement BAYROU sera-t-il censuré le 16 janvier prochain ? Certains le désirent ardemment et d’autres le redoutent ! En tout état de cause, c’est la porte ouverte à toutes les conjonctures possibles du côté de l’Histoire, et toutes les conjectures imaginables dans les rangs des politiques et des médias. Parmi celles-ci, on compte un passage à la VIème République, la démission du Président MACRON, la convention de non-censure, le 49.3, l’article 16 de la Constitution…
TRIBUNE : Ceux qui rejettent la censure craignent une instabilité néfaste à la vie politique, économique et financière, dommageable à la France. Mais ont-ils des craintes pour la France ou leur poste ? Les partisans de la censure se retrouvent parmi le Parti Communiste, les « Verts », LFI et certains membres du PS. Le NFP a implosé depuis des lustres. Il a juste permis aux uns et aux autres de se faire élire à l’assemblée, comme Élisabeth BORNE qui trouvera un siège de député dans les « poubelles » de la politique, grâce aux voies de LFI…
Ceux qui sont opposés à la fin du gouvernement animé par François BAYROU sont pour l’instant majoritaires. Le pouvoir est entre les mains des indécis : le RN ! Marine LE PEN tient le gouvernement entre ses mains. Aujourd’hui de nouvelles donnes troublent le vote du Rassemblement National : l’échéance judiciaire de son égérie et le décès de Jean-Marie LE PEN. Il faudra également surveiller les réactions politiques, suite au décès d’un homme politique qui aura marqué l’histoire durant plus de cinquante ans. Un militaire, un polémiste, un provocateur, un ancien député dont les propos contestés et contestables lui on valut de nombreuses condamnations. Les interventions des dirigeants politiques concernant Jean-Marie LE PEN seront donc examinées à la loupe par les membres du RN.
Les fantasmes politiques des gouvernants et des médias
Depuis de nombreuses années, Jean-Luc MELENCHON en avait fait un cheval de bataille. A ce jour, on compte 25 réformes de notre constitution. La première fut d’instaurer l’élection du président par le suffrage universel. Le Général de GAULLE avait déclaré lors de la conférence de presse du 31 décembre 1964 : « Une constitution, c’est un esprit, des institutions, une politique… ».
Si on peut constater que l’esprit de la République se délite depuis 1958, du côté des institutions et de la pratique, notre constitution tient toujours la route à quelques exceptions près. Une certaine amoralité corrode peu à peu l’esprit : tel président condamné à une peine de prison, tel autre surpris en scooter en train de rejoindre sa maitresse, des députés (surtout chez LFI) au comportement vulgaire, député sous « OQTF », député condamné à la prison, député quasiment analphabète…
Pour le Général, l’esprit procède de la nécessité d’assurer aux pouvoirs publics, l’efficacité, la stabilité, et la responsabilité dont ils manquaient sous la IVème République. Aujourd’hui, nous sommes revenus au régime des partis et une efficacité amoindrie par le manque d’argent (dette abyssale et déficit budgétaire qui rapprochent dangereusement l’Etat de la banqueroute).
Le choix de la Vème République fut aussi induit par la désunion nationale prégnante sous la IVème (guerre d’Algérie oblige). Aujourd’hui, cette absence d’unité est permanente, alimentée par l’affrontement de personnalités politiques qui veulent le pouvoir. Le paysage politique ressemble à « égoland », et les citoyens oscillent de droite à gauche, sur le modèle du balancier de Schopenhauer : de la souffrance à l’ennui, de l’ennui à la souffrance…
Qu’il s’agisse de la censure ou de faire démissionner Emmanuel MACRON, c’est la Présidence de la République que lorgne ouvertement certains, et en filigrane, d’autres. Un inventaire non exhaustif des prétendants : François BAYROU, Marine LE PEN, Jean-Luc MELENCHON… En embuscade : Jordan BARDELLA, Gabriel ATTAL, Gérald DARMANIN… Et n’oublions pas Emmanuel MACRON qui par un tour de passe-passe pourrait vouloir se maintenir…
L’esprit de la Vème République détruit par Jacques CHIRAC ?
L’esprit de la Constitution, c’est garder un parlement législatif et faire en sorte que « le pouvoir ne soit pas la chose des partisans mais qu’il procède directement du peuple, ce qui implique que le chef de l’Etat, élu par la Nation, en soi la source et le détenteur ». Lorsque Napoléon fit assassiner le Duc d’Enghien, Talleyrand déclara : « Sir, plus qu’une erreur, c’est une faute » ! On peut dire aujourd’hui la même chose à notre président quand il a dissous l’Assemblée Nationale.
La donne était limpide : le président ne pouvant dissoudre ni renverser le parlement, chacun est donc enfermé dans son domaine. Ainsi, le parlement se trouve intangible, et vote ou non les lois et le budget, comme il le juge bon. De GAULLE avait insisté sur le fait que le président ne soit pas élu simultanément avec les députés. Et c’est précisément sur ce point que le bât blesse. Jacques CHIRAC a détruit l’esprit de la Vème, en ramenant le septennat à un quinquennat qui n’a d’intérêt que pour la présidence et son gouvernement, et permet aujourd’hui un retour aux partis et à la IVème République.
Ainsi, le président assure par son élection, un parlement fidèle durant tout son mandat et se donne un pouvoir sans garde-fou : l’épée de Damoclès sur la tête du président lorsque les législatives arrivaient durant le septennat. La Vème, c’est un septennat et les accros du pouvoir veulent garder la prérogative des deux élections concomitantes : présidentielles et législatives !
Pousser le Président de la République à la démission : une faute grave…
Nous l’avons vu, notre constitution fonctionne bien. Lorsque le gouvernement propose des lois, et si l’Assemblée est en désaccord, la motion peut être votée. Si le gouvernement souhaite poser le 49.3, cela peut provoquer une motion de censure. Le 49.3 permet au président d’affirmer sa volonté d’agir. La motion de censure redonne finalement la parole au peuple, et les négociations de coulisses qui doivent faire renoncer à ladite motion de censure par certains partis est un déni de démocratie !
On a pu constater lors de la réforme des retraites alors que le peuple était contre, que nos députés s’isolaient de plus en plus des citoyens et ne s’intéressaient à eux qu’au moment des législatives et des présidentielles, à coups de propositions de lois hypocrites et démagogiques ! Pire encore, lorsque le locataire de l’Elysée sent que le pouvoir lui échappe sur certains domaines, il constitue des « conventions citoyennes », notamment sur le suicide assisté. Ce qui a provoqué un tollé au sein d’un parlement fortement clivé sur le sujet.
Oui, la Constitution marche bien à condition d’en vivre l’esprit et les moyens originels. L’état d’esprit disparaît de tous les côtés, gouvernants et gouvernés ! Emmanuel MACRON a beau jeu de dire qu’il a été élu démocratiquement, mais pas par la majorité des inscrits. Si on prend en compte les abstentions, les suffrages exprimés et les votes pour le président, il ne fut élu réellement que par le tiers des citoyens : cherchons la légitimité. Encore plus grave : vouloir pousser le Président MACRON à démissionner constituerait une faute grave. Ni le peuple ni les médias n’auraient une quelconque raison démocratique et constitutionnelle à soumettre la démission.
Le fantasme de l’article 16
Sa mise en œuvre n’est pas évidente et permet à certains partis de manipuler l’information aux fins de faire pression auprès du locataire de l’Elysée : « Lorsque les institutions de la République, l'indépendance de la Nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux sont menacés d’une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier ministre, des Présidents des Assemblées ainsi que du Conseil constitutionnel. ». Les conditions prévues par l’article 16 sont loin d’être réunies. Le Conseil Constitutionnel sera alors saisi par les présidents des deux chambres aux fins de mesurer l’exactitude de la situation.
En résumé, notre constitution peut être efficace en revenant à l’esprit du septennat ! Vouloir une motion de censure le 16 janvier prochain, est un non-sens quand on sait que pour le vote des lois, l’Assemblée Nationale, la voix du peuple, garde le dernier mot et qu’Emmanuel MACRON déclare en permanence qu’il ne démissionnera pas !
« En dehors du français, il y a une seule langue nationale que la Constitution tolère : la langue de bois ! ». Vincent ROCA.
Jean-Paul ALLOU