Le verre d’eau est rafraîchissant. La Maison de l’Ecologie, sise au beau milieu de la Rue Joubert, à Auxerre, à quelques encablures du théâtre cher à son directeur Pierre KECHKEGUIAN, ne possède pas de climatisation ! Logique : il faut être développement durable dans l’esprit et respecter l’indispensable couche d’ozone. Mais se désaltérer de ce salvateur liquide sert aussi à mieux appréhender la vingtaine de toiles accrochées aux cimaises de la maison « verte ». Les œuvres, tout en symbole, portent la patte de l’artiste congolais (la République Démocratique, version Kinshasa) Christian BADIBANGA. On aime son travail et on l’encourage !
AUXERRE: Il ne chôme pas cet été, le peintre originaire de l’ancien Zaïre ! Un pays à l’immense étendue de forêts tropicales avec sa faune sauvage et ses richesses en sous-sol qui se fit connaître de cette appellation si pittoresque lors de la Coupe du monde de football de 1974 en Allemagne ! Certains possèdent encore en mémoire le cinglant et brutal 9 à 0 que la Yougoslavie de la grande époque infligea aux pauvres « Eléphants » lors de leur premier match, de quoi décontenancer le premier pays du continent noir à disputer un mondial ! Drôle de manière de rentrer dans l’histoire du sport et d’en sortir sans gloire peu de temps après !
2024, le Zaïre est redevenue depuis longtemps la République démocratique du Congo. La RDC ! Si le football y a gagné au fur et à mesure ses galons en glanant quelques résultats à la CAN, que dire en revanche du délabrement humaniste de ce pays qui se classait à la 164ème place sur 174 états selon l’indice de capital humain en 2020.
Une situation qui ne s’est guère améliorée depuis. Et qui est la conséquence de décennies de conflits ouverts, ayant engendré des milliers de morts dont les médias occidentaux ne parlent jamais. Sauf de temps à autre avec le Kivu, région de l’est de grand pays, qui voient s’affronter factions et rebelles avec les forces armées officielles…
Les couleurs de l’espérance, sources de la vie…
La guerre, il l’a connu, Christian BADIBANGA. Lui qui a dû fuir son pays natal pour rejoindre la France, alors que sa carrière artistique lui avait déjà conféré une notoriété importante. Il en a subi les horreurs, la peur, le dégoût, l’amertume en frôlant la mort de près.
Au lavoir de Saint-Bris-le-Vineux, en juillet, le Jovinien d’adoption – il y possède grâce à la municipalité son atelier où son imaginaire fécond fait le reste – avait surpris les amateurs de toiles expressives par la qualité de son travail. Un travail qui rend un hommage très appuyé aux femmes. Surtout à celles, de tout âge, qui ont été massacrées dans d’atroces conditions lors de ces exactions monstrueuses dont l’humanité a aussi le secret dans ses mauvais jours…
Certes, ces toiles sont le reflet de l’âme. Sombres, tristes, parfois déroutantes de complexité et de construction. Mais, l’espoir est bel et bien présent. Grâce à la présence chromatique de couleurs chatoyantes et vives. Des ocres flamboyants ! Des rouges vifs ! Des oranges virevoltants !
« C’est une manière de rappeler la beauté de ces femmes innocentes, qui sont belles autant de l’intérieur que de l’extérieur, explique le jeune homme dans un français maîtrisé à la perfection, avec ces couleurs, je redonne la vie à ces femmes et à leurs enfants… ».
Des projets à la pelle : l’automne sera animé pour l’artiste
Poignant de vérité ! Soucieux de la défense de l’environnement et de la sauvegarde de la nature, Christian BADIBANGA avait coché sur son agenda de venir exposer tôt ou tard au sein de la Maison de l’Ecologie, au cœur d’Auxerre.
« Moi, je me bats pour l’environnement, même dans l’approche créative de mon travail, ajoute-t-il, je récupère des boutons, du plastique que j’introduis ensuite sur mes tableaux. L’écologie et ses valeurs, cela me parle et on doit se mobiliser pour cette cause que l’on soit artiste ou pas… ».
Quant aux projets, ils se nourrissent au fil des rencontres, ceux-ci s’avérant très fructueux. Lille ou Washington figurent parmi ses priorités pour les futures présentations publiques de ces œuvres d’ici la fin de l’année.
Mais, le plus Français des Congolais de la RDC vivant dans l’Yonne nous promet d’autres rendez-vous dans la capitale de notre teritoire. Notamment après son tout récent travail collaboratif, réalisé en complicité artistique avec la journaliste/écrivaine et maintenant poète, Anne-Charlotte LAUGIER !
L’Icaunaise a laissé de côté pour le moment les aventures truculentes et irrésistibles en humour de sa « Pétasse » en déclinaison multi-sociétale pour se consacrer à la publication d’un recueil de poésie dont chacun des textes est illustré par le crayonné symbolique du peintre africain. Une prouesse en matière de créativité au vu du rendu sur le papier. « Amour Fauve » et sa conception feront l’objet d’une exposition à l’automne, on parle de l’Abbaye Saint-Germain, lieu intemporel idéal…
Si vous passez à la Maison de l’Ecologie, ce week-end, vous pourrez admirer également les nouvelles toiles du talentueux peintre de l’âme. Dont quatre de ses créations spéciales, toutes en nuances, en rêverie et en messages d’espérance pour ces femmes africaines dont il ne faudra jamais oublier la mémoire.
En savoir plus :
Exposition Christian BADIBANGA
Maison de l’Ecologie
Rue Joubert à Auxerre
Ouvert tous les jours jusqu’à dimanche 01er septembre
Entrée libre.
Thierry BRET