Faire des terroirs et des ressources naturelles un élément clé de l’offre touristique, c’est le challenge auquel s’est attelé avec succès l’Office de Tourisme de l’Auxerrois depuis longtemps déjà. Si le vignoble est partie prenante du patrimoine culturel et historique du territoire et contribue à sa renommée, l’interaction entre le monde sportif et le développement touristique est aujourd’hui réalité, grâce notamment à la renommée et au capital sympathie, engendrés par l’AJ Auxerre. Autant de thèmes abordés lors des tables rondes qui ont rythmé la journée « Si on parlait tourisme »…
AUXERRE : La capitale de l’Yonne peut se targuer d’être aujourd’hui la seule ville de l’Hexagone de moins de 120 000 habitants à évoluer en Ligue 1 avec son club mythique de l’AJA qui, selon son président exécutif et directeur général, Baptiste MALHERBE, « totalise plus de 300 000 spectateurs sur les deux dernières saisons, pour 1,4 million de supporters à travers la France ». Un succès qui n’est pas sans retombées économiques pour le territoire, estimées à 10 millions d’euros : « il n’y a plus trop de clubs à taille humaine dans le championnat et on a la chance d’avoir cette richesse. Que l’on aime ou pas le foot, on se rend compte que cela ne peut qu’apporter du positif pour la ville… ». Des études sont menées actuellement de concert avec la CCI de l’Yonne pour évaluer encore plus précisément l’impact économique et sociétal du club : « mais on sait que généralement, en Ligue 1, les supporters extérieurs en profitent pour rester deux ou trois jours et visiter… ». L’espace muséal, créé il y a deux ans dans l’enceinte même de l’Abbé Deschamps, a accueilli pour sa part plus de 5 000 visiteurs. Première pierre d’un projet de grande envergure visant à réaménager l’espace autour du stade pour étoffer et diversifier l’offre d’accueil. Autant de touristes potentiels pour Auxerre et le Grand Auxerrois.
Fondateur de « Territoire Sport », agence de voyages spécialisée dans le sport, Thomas BOUSSARD contribue lui aussi à développer le tourisme sur le territoire. Cet Auxerrois d’origine, installé aujourd’hui en Dordogne, compte revenir s’installer dans sa région natale d’ici deux ans, pour proposer des séjours « clés en main » autour d’évènements sportifs. Avec déjà une petite idée sur l’avenir : « pourquoi pas, à travers de randonnées notamment, faire découvrir le patrimoine culturel et terminer la journée par un match à l’Abbé Deschamps… ? ». Vous reprendrez bien un peu de vélo dans votre vin ? Gérant fondateur de « Cycle divin », Grégory MILLET a exercé dans le milieu du vin durant une vingtaine d’années, avant de devenir moniteur cycliste, de s’installer à Vincelottes et faire découvrir les vignobles à vélo. Des vélos à assistance électrique bien sûr car les coteaux, c’est sympa, mais ça grimpe ! A son catalogue : les vignobles de Saint-Bris, d’Irancy, de Coulanges, de Chablis et du Vézelien, avec demain peut-être, Joigny et Tonnerre : « il y a encore beaucoup de choses à faire dans l’Yonne pour faciliter l’accès à vélo. On a le canal, c’est une force, mais pour accéder aux vignobles, c’est un peu compliqué ! Il suffit de comparer avec la Côte d’Or, où existe déjà une piste cyclable aménagée à cet effet… ».
La randonnée, gage de reconnaissance pour les touristes
Quel adepte de la randonnée ne connaît pas encore l’application « Visorando » ? Près de 11 000 professionnels inscrits dont un millier d’offices de tourisme, plus de 24 millions de visites annuelles sur le site pour près de 40 000 randonnées répertoriées à travers le monde, principalement en France. Son fondateur, Fabien DIVERT, a des raisons particulières d’apprécier notre département : « l’Office de tourisme de Puisaye-Forterre a été le premier à nous faire confiance pour faire connaître ses chemins de randonnée… ». L’application est pour une grande part gratuite et permet de trouver des itinéraires de balade autour de soi, dument détaillées. Ce qui ne manque pas dans le paysage auxerrois !
Pour paraphraser SULLY, ministre d’Henri IV, comme chacun sait, l’on pourrait dire que « agritourisme et œnotourisme sont les deux mamelles de l’Auxerrois » ! Comment travailler aujourd’hui avec des partenaires institutionnels ou privés, pour développer l’activité touristique ? C’était le thème de la table ronde de l’après-midi, en présence d’acteurs majeurs du territoire. Installée à Saint-Boil sur une ferme viticole de la côte chalonnaise, Edith BONNET est administratrice de l’association « Accueil paysan » : « pas forcément reconnue d’un point de vue institutionnel, car on est au croisement de tout. Pour les institutions agricoles, on fait du tourisme, pour les institutions touristiques, on fait de l’agriculture ! ». Une identité pourtant bien établie, reposant sur un système de complémentarité, partagé entre les activités agricoles et touristiques et des valeurs favorisant une agriculture paysanne et un tourisme durable et solidaire : « on s’aperçoit que l’agrotourisme est aujourd’hui un facteur d’installation des paysans, dans un contexte où les revenus agricoles ne sont pas au rendez-vous. Cela correspond à un besoin d’ouverture, de rencontres et de médiation, entre le monde agricole et le monde citoyen, de plus en plus coupé du milieu rural… ». Et quels meilleurs ambassadeurs que les agriculteurs, par nature fervents connaisseurs du milieu, de la nature et de l’histoire du pays dans lequel ils vivent et travaillent ?
Des femmes débordantes de projets !
Ses amis la surnomment « Maya l’abeille » ! Installée dans le nord Sénonais, en limite du Gâtinais, Christine BUSSON exerce depuis une quarantaine d’années le métier d’apicultrice. Pratiquant la vente directe, elle est aussi ferme découverte et accueille à l’occasion les camping-cars. Adhérente depuis trois décennies du réseau « Bienvenue à la Ferme », dont elle vient de quitter la présidence, Christine partage la même passion que le témoin précédent : « l’ambition est la même : pouvoir vivre sur ma ferme de mes productions, avec cette envie de faire connaître mon métier et sensibiliser les gens à consommer de bons produits… ». Une ambition parfois contrariée par les difficultés rencontrées pour communiquer sur les marchés qu’elle organise l’été, face au refus de certaines communes du voisinage ne l’autorisant pas à installer un affichage éphémère pour annoncer l’évènement : « il y a un travail à mener pour un peu plus de tolérance en la matière, surtout lorsqu’on respecte à la lettre les dates de pose et de dépose des panneaux… ». Etablie depuis cinq ans à Saint-Bris-le-Vineux, Claire GENEST a une carte de visite bien remplie : « j’exerce quatre métiers à la fois : l’élevage de chèvres, la fabrication de fromages bio, la vente, ainsi que l’accueil, notamment des groupes scolaires et des colonies de vacances ». La gérante de la ferme ULTERIA souhaiterait bien amplifier l’activité touristique sur sa ferme, mais ce n’est pas facile, même avec l’aide des acteurs locaux : « il faut du temps pour développer son activité et les difficultés à recruter sont grandes ».
Faire cohabiter l’offre touristique à l’offre sportive
Qui ne connaît pas « La Route des vins d’Alsace », cet itinéraire mythique sillonnant vignobles et villages pittoresques de toute une région ? Présidente de l’association « Alsace Destination Tourisme », Nathalie KALTENBACH a évoqué l’œnotourisme et le travail mené pour le rendre encore plus attractif : « la route des vins est une « grande Dame » qui a fêté ses 70 ans l’an passé et il est vrai que notre problème n’est pas le manque de fréquentation, ce serait plutôt l’inverse ! ». Mais on ne s’improvise pas acteur touristique et un travail important est fait en ce sens auprès des vignerons : « il y a encore des caves où c’est la mamie qui accueille le touriste, quasiment au coin du feu ! Ce que nous souhaitons aujourd’hui, c’est faire vivre aux visiteurs un moment d’exception, les faire rêver et un gros travail de formation est mené auprès de nos partenaires… ».
En une décennie, les activités autour du vin se sont multipliées : apéros gourmands, banquets au milieu des vignes, fête des vendanges, balades en gyropode, chasse au trésor, activités sportives au sein du vignoble… De quoi s’il en était besoin, donner quelques idées supplémentaires à Benjamin GUIHARD, directeur de l'Office de Tourisme Chablis, Cure, Yonne & Tonnerrois. Si l’appellation Chablis est une « marque » qui parle, reconnue dans le monde entier, une dynamique existe aujourd’hui chez les acteurs de la filière pour intensifier l’offre touristique, notamment au travers du sport : « nous avons la chance chaque année d’accueillir le marathon de Chablis, un évènement festif sur le concept de celui du Médoc. L’intérêt étant qu’il est adossé le même week-end à la fête des vins, avec deux publics différents qui se côtoient et que l’on essaie de faire cohabiter… ». Goûtez moi donc cet excellent premier cru Montée de Tonnerre… ? « J’peux pas, j’ai marathon et ça grimpe aussi ! ».
Dominique BERNERD