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Le Cercle Condorcet d’Auxerre s’interroge sur l’agriculture de demain : quel avenir pour les exploitants ?
juin 23, 2023Le monde agricole est en pleine mutation. Il connaît un effondrement démographique sans précédent. Quelle sera sa place demain au sein de la société française ? Une interrogation à laquelle les intervenants au débat organisé par le Cercle Condorcet auxerrois ont apporté quelques éléments de réponses. Grand témoin de la soirée : Bertrand HERVIEU, sociologue et ancien président de l’INRA, auteur entre autres, d’un livre au titre iconoclaste, « Une agriculture sans agriculteurs ». A ses côtés : une figure du monde paysan icaunais, Jean-Marie SAPIN, membre fondateur du célèbre GAEC de Chichery, aujourd’hui retraité et l’ethnologue Pascal DIBIE, professeur émérite des Universités, aux attaches départementales bien connues.
AUXERRE : Selon le dernier recensement général de l’agriculture réalisé en 2020, la France compterait aujourd’hui un peu moins de 417 000 exploitations agricoles. Un nombre qui ne cesse de diminuer au fil des années, ne représentant plus que 1,5 % de la population active nationale, contre 50 % à la fin du XIXème siècle. Une évolution très rapide puisqu’en l’espace de vingt ans, 20 % des exploitations ont disparu. Un processus démographique qui s’accompagne d’une recomposition dans l’organisation du travail selon Bertrand HERVIEU : « en gros, l’on a aujourd’hui deux fois plus de salariés que d’effectifs non-salariés au sein des entreprises agricoles… ».
Des chiffres qui s’expliquent par la montée en puissance, au détriment des structures familiales, de grosses exploitations, à l’image du constat réalisé en Bretagne : « une région typique jusqu’alors, de l’exploitation familiale, qui compte désormais 37 % de grandes, voire très grandes exploitations, avec de nombreuses « holdings » agricoles rassemblant plusieurs établissements de production, notamment dans la filière porcine… ».
Un changement de paradigme qui n’est pas sans conséquence sur les revenus : « le monde agricole est le secteur indépendant où l’on a le plus grand éventail de revenus, avec 10 % d’exploitations à revenus négatif d’un côté et pour les plus grosses, des revenus par unité de travail, allant jusqu’à 80 ou 100 000 euros par an… ».
Une fourchette considérable rendant très difficile toute idée de pensée ou d’action commune.
L’agriculture pour lutter contre le monde ouvrier…
L’exploitation de type familiale fut longtemps synonyme d’unité de lieu, de temps et de vie, où rien ne séparait le monde du travail et la vie quotidienne. Un modèle en décalage avec la culture contemporaine, plus apte à privilégier une frontière entre ces deux mondes, avec là encore, souligne l’ancien président de l’INRA, « l’introduction de tensions très fortes socialement parlant, entraînant dans le monde agricole un taux de célibat et de suicide record… ».
Qu’il est loin le temps où, après 1870, Léon GAMBETTA se faisait chantre de l’agriculture, visionnaire en la matière, à qui l’on prête ces propos : « Faisons chausser aux paysans les sabots de la République et quand ils les auront chaussés, la République sera invincible ».
Une vision patriotique pour contrer le mouvement ouvrier naissant. C’est à cette époque, que dans la foulée du ministère de l’Agriculture, furent créés le Crédit Agricole, les systèmes d’assurance, la Mutualité Agricole, « tout un dispositif pour entourer et entraîner ce mouvement de la petite propriété agricole, dans une vision de sécurité alimentaire et d’autosuffisance, pour tous… ».
Une vision politique qui eut aussi pour conséquence, de privilégier l’achat de foncier au détriment de la modernisation agricole, contrairement à d’autres pays comme l’Allemagne ou la Grande-Bretagne.
Dix milliards d’euros en soutien à l’agriculture…
Après la Seconde Guerre mondiale, place au « fermage » avec l’idée « qu’il n’était plus besoin d’acheter de la terre, ce qui permettait de se consacrer à la production… ».
Un mouvement qui donna naissance dès 1953 au CNJA, ancêtre du syndicat des « Jeunes Agriculteurs », mettant sur les rails le train de la modernisation pour le monde agricole et la naissance de l’industrie agro-alimentaire : « l’agriculture se fait marchande et non plus seulement paysanne… ».
Une époque dont nombre d’agriculteurs sont encore nostalgiques, celle des « prix garantis », avec l’assurance que la puissance publique assurerait le différentiel en cas de besoin. Depuis son entrée dans l’OMC en 1992, l’agriculture est désormais confrontée aux prix mondiaux, « un changement des règles du jeu qui continue de produire un phénomène de concentration assez important… La solution adoptée alors, fut de créer une prime à l’hectare sur le différentiel entre prix mondial et prix garanti, ceux qui en avaient le plus, captant la majorité des primes versées. Un système que l’on n’a jamais réussi depuis à déverrouiller… ».
Ce que semble regretter celui qui est également inspecteur général de l'agriculture honoraire : « une masse annuelle de 10 milliards d’euros, orientée vers les soutiens à l’agriculture, ce n’est pas rien ! Je suis de ceux qui considèrent que ce n’est pas une façon très moderne et contemporaine, de gérer cette somme sous forme de rente et non de contrat… ».
Propos entendus…
Sylvain JOLITON, président du Cercle Condorcet Auxerre :
« Essayons d’être complémentaires pour réapprendre à nous parler parce que je crois que ce qui fait la beauté de nos échanges, ce n’est pas nécessairement nos accords, mais avant tout, notre capacité à poursuivre notre dialogue. Et c’est comme ça que j’aime notre Cercle Condorcet et que j’aime mon pays »…
Jean-Marie SAPIN :
« L’Yonne compte aujourd’hui 3 635 exploitants, en recul de 10 % depuis dix ans, pour une moyenne de 114 ha par exploitation. Si 53 % des agriculteurs ont plus de 50 ans, près de 800 ont déclaré ne pas avoir de successeur, avec pour conséquence, un agrandissement important des exploitations dans l’avenir. Et plus elles s’agrandissent, moins elles se syndicalisent, moins elles intègrent la coopération. Les organisations professionnelles vont en souffrir beaucoup dans les prochaines années… ».
Eric S, agriculteur en activité :
« Je suis témoin que cela devient de plus en plus difficile de travailler de façon sereine, du fait de problèmes de cohabitation avec les promeneurs, les cyclistes, avec la société du loisir… Là où j’habite, c’est mon lieu de vie, mais c’est aussi mon « casse-croûte » et ma crainte est qu’avec le développement du tourisme, avec le télétravail, la cohabitation soit de plus en plus difficile… ».
Pascal DIBIE :
« La nature aujourd’hui, on veut la partager entre tous, elle n’appartient plus aux seuls agriculteurs, on le voit bien avec les grands mouvements de contestation autour des bassines… ».
Bertrand HERVIEU :
« Les campagnes sont devenues aussi des espaces résidentiels, il va falloir apprendre de part et d’autre les nouvelles règles du jeu qui sont en place. Nous ne sommes plus dans la situation où les trois quarts d’un conseil municipal étaient occupés par des familles d’agriculteurs qui géraient ensemble les parties communes des propriétés privées. Les regards ont changé et je pense qu’il y a quelque chose à construire, à imaginer, pour se parler et comprendre les intérêts de chacun… ».
Dominique BERNERD
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Cité des Vins : le Haut Potentiel Touristique de Chablis s’affichera dès juillet dans les couloirs du métro de Paris
juin 15, 2023Elle s’est exprimée avec beaucoup d’enthousiasme, Madame le maire de Chablis Marie-Josée VAILLANT. Normal, l’inauguration de la Cité des Climats et Vins de Bourgogne, vécue ce jeudi en milieu de matinée devant un joli parterre d’invités, la concerne au premier chef. Surtout au niveau du rayonnement touristique qui découlera de cette infrastructure, mêlant judicieusement l’accord du patrimoine ancien à celui plus récent qui devrait interpeller les visiteurs à l’avenir…
CHABLIS : « C’est une vraie valeur ajoutée ! ». Invitée à prendre la parole lors de la cérémonie protocolaire de l’inauguration de la Cité des Climats et Vins de Bourgogne, sise à Chablis – rappelons pour mémoire que le concept se décline en un triptyque très novateur pour la Bourgogne, tant à Beaune qu’à Mâcon -, Marie-Josée VAILLANT, successeur de Patrick GENDRAUD à la municipalité de Chablis, n’a pas modéré ses propos empreints de fierté de voir apparaître dans sa commune cette nouvelle pépite touristique consacrée à la vigne, au terroir et à ses produits, synonyme d’indéniable attractivité.
Un premier joyau, basé sur l’œnotourisme et sa promotion visuelle qui immanquablement devrait impacter à l’avenir la fréquentation du nombre de visiteurs dans la commune au nom universellement reconnu de par le monde.
« Faire rayonner le chablis et la Cité s’inscrit dorénavant parmi nos nouvelles priorités en matière de communication, devait ajouter l’édile sous les regards approbateurs des personnalités présentes à cet évènement, un rayonnement qui se traduira aussi par le développement économique de la localité… ».
Preuve à l’appui, l’élue de l’Yonne évoquera l’ouverture de nouveaux commerces sur son territoire communal, un fait « à l’opposé de bon nombres d’agglomérations qui constatent la perte de leurs vitrines de proximité ».
La Cité des Climats et Vins est un incontestable atout pour Chablis, reconnaît également la présidente de l’Office du tourisme Chablis Cure, Yonne et Tonnerrois. « On connaît tous la série « HPI », plaisante Marie-Josée VAILLANT, mais Chablis, c’est aussi une ville qui possède un haut potentiel touristique ! ».
Et comme un bonheur ne vient jamais seul – version cadeau de bienvenue à placer dans la corbeille de la mariée ! -, Marie-Josée VAILLANT devait annoncer que la communication de Chablis dédiée à son nouvel écrin touristique serait ciblée dès la première semaine de juillet dans le métro parisien. Plusieurs couloirs dudit mode de locomotion préféré des Parisiens (!) seront ainsi placardés d’affiches publicitaires vantant les mérites de la Bourgogne septentrionale, de ses vins et de ce nouvel espace qu’il est impérieux de visiter pour mieux en apprécier toutes les subtilités.
Une campagne de marketing basée sur le concept de « L’Yonne en Bourgogne » faisant halte dans différentes stations au doux nom d’Ancy-le-Franc, Tanlay, Chablis, etc. In fine, ce seront cinq affiches distinctes qui habilleront plusieurs couloirs du métro, formant ainsi une invitation sympathique à découvrir la « rame 89 » !
Thierry BRET
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Welcome to London : La Chablisienne en quête de nouvelles distinctions internationales début juillet
juin 10, 2023La coopérative centenaire de Chablis se porte comme un charme. Pas la moindre ride aux commissures des lèvres ni sous les paupières ! Pour preuve, la vénérable institution viticole regroupant plus de 250 vignerons sera présente le 04 juillet à Londres pour obtenir un nouveau sésame lors de « l’International Wine Challenge ». Une compétition où elle glane succès sur succès à chaque édition…
CHABLIS : Elle les accumule au fil des années, les récompenses à l’international. Logique quand on possède l’âge de ses artères et que l’on vient de fêter dignement le centenaire de son existence ! Une célébration de belle facture qui fut accueillie au printemps dans le cadre romanesque de l’Abbaye de REIGNY, haut-lieu de l’art cistercien bourguignon.
Mais, aujourd’hui, les regards de la direction générale de la plus connue des coopératives de notre territoire se tournent vers « la perfide Albion ». Précisément, dans sa capitale, Londres, la mégalopole qui début juillet accueillera l’incontournable « International Wine Challenge ».
Habituée de ce rendez-vous très prisé par la fine fleur de la filière viticole du globe, La Chablisienne tentera de réitérer l’excellent résultat obtenu l’an passé, à savoir ramener le titre de meilleur vinificateur de vin blanc 2022 dans sa besace.
Lors de la précédente édition, la coopérative de l’Yonne remportait ainsi son quatrième titre grâce au travail d’expert de son œnologue de l’époque, Vincent BARTEMENT. Ce fut un vrai satisfecit pour Damien LECLERC qui en sa qualité de directeur général de la dive maison fait tourner la boutique avec efficience et réalisme depuis qu’il en a pris les rênes.
De 7 à 9 millions de bouteilles en production à l’année…
En accueillant il y a quelques jours une délégation de chefs d’entreprises invités par le MEDEF de l’Yonne et la direction régionale de l’assureur mutualiste GROUPAMA Paris Val-de-Loire dans le cadre d’une convention de partenariat, le patron de la coopérative a évoqué l’importance de ce concours, l’un des plus influents dans la sphère viticole internationale. Un concours où il est bon d’être présent et de se distinguer, cela va de soi !
Représentant près d’un quart de la superficie du vignoble du chablisien, la coopérative vinifie l’équivalent de 1 200 hectares de vignes et produit près de sept à neuf millions de bouteilles à l’année, par le biais d’une trentaine de cuvées différentes à obtenues partir d’un seul cépage : le chardonnay. Elle emploie soixante-quinze salariés. La maison est aussi propriétaire du domaine de Château Grenouilles.
Thierry BRET
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Elle est fort roulante la départementale 943, reliant Joigny à Montargis. En franchissant paisiblement la frontière routière, le Loiret nous accueille. Bonjour au joli petit bourg de Douchy où réside régulièrement sieur Alain DELON qui tourna avec les plus grands : Monsieur Jean GABIN, Lino le catcheur, Bebel...mais aussi les plus belles dont l'inoubliable Romy ou encore BB l'icône des sixties !
DICY : A Douchy, l'accueil bistrotier est des plus sympathiques au « Terroir » en centre bourgade, un café-resto ouvert 7 jours/7 ! Cela rigole sec au comptoir ! Retour icaunais à Dicy (350 habitants environ), une localité baignée faiblement par la Chantereine. Notre auberge de bord de route, c'est « Chez Lucie », le prénom de la jeune patronne. L'intérieur y est d'une grande propreté. La veille eut lieu le vide-grenier villageois, ce lundi la quiétude est de retour ! L'accueillante terrasse permet aux amateurs de déjeuner dehors, c'est chouette !
Une ardoise au triple choix d'entrées, plats et desserts, d'une cuisine maison se présente au regard : cette formule, si l'on en respecte les basiques, a fait ses preuves.
Un plaisir gustatif : percevoir les parfums de poivron et de tomate…
Le poireau vinaigrette est délicieux : il est soigneusement assaisonné et parsemé de persil et d'échalotes. On se régale, d'autant qu'il est servi parfaitement à température et non glacé, sortant du frigo, comme trop souvent : une pure horreur ! Le Bourgogne rosé du vigneron de Saint-Bris Gérard PERSENOT l'accompagne fraîchement en cette semaine ensoleillée. Pourquoi trop souvent des rosés translucides de partout, alors que ceux de chez nous sont délicieux ?!
En plat, la bavette sauce au bleu, à l'impeccable cuisson saignante, est plébiscitée par la table voisine. Le poulet à la basquaise et ses légumes variés sont fort bons. Quant à la sauce, on y perçoit nettement les parfums de poivron et de tomate. Commandant du poulet au restaurant, il ne serait pas désagréable de se voir parfois, servir un autre morceau que la sempiternelle cuisse, plus simple aussi à préparer pour nos restaurateurs. Le pain de la boulangerie-pâtisserie de Villefranche-Saint-Phal est aussi bon que croustillant, mais aussi cuit comme il se doit. Ces pains blanchâtres.... : je crois que je ne m'y ferai jamais !
Un flan digne des meilleures pâtisseries dégustées…
Mention spéciale pour le superbe flan ! C’est sûrement la pâtisserie préférée de votre serviteur ! - moelleux à souhait.....comme vous le révèle ce petit cliché (que je ne me permets pas de qualifier de photo !). Il est délicieux vraiment, et digne des meilleurs.
Tandis que je règle l'addition, nous discutons à bâton rompu avec la souriante patronne. Lucie est là depuis sept ans. Je la complimente pour ce bon menu à 15,50 euros. Elle m'évoque alors ses parents, derniers charcutiers de génération en génération hélas, établis antan à Bois-le-Roi en Seine-et-Marne. Je reconnus alors, non sans une certaine émotion, la boutique si souvent vantée par ma belle-sœur Pascale, le dernier véritable cordon bleu que je connaisse d'ailleurs. Son blog culinaire est un modèle du genre (Les Recettes de Pascale) où il n’y a pas d'esbroufe, ni de mousse. Juste du bien et du bon. Et le plaisir de faire plaisir, aussi…
En digne disciple de Saint-Antoine - le patron des charcutiers - Lucie m'indique à Triguères, entre Douchy et Château-Renard une excellente boucherie-charcuterie « La Triguéroise ». Mais d'ici ou d'ailleurs, allons tous chez Lucie !
En savoir plus :
Les - : le petit parking en contrebas mériterait sûrement d'être mieux signalé.
Les + : le service est aimable. Le rapport qualité-prix est très bon.
Contact :
Chez Lucie
10, route de Joigny
89120 DICY
Tel : 03.86.43.09.52.
Gauthier PAJONA
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« Chaud devant ! » : la filière viticole est en pleine réflexion face aux effets du changement climatique dans l’Yonne
juin 07, 2023Faudra-t-il un jour remplacer le cépage emblématique de la Bourgogne qu’est le pinot noir, par une variété plus adaptée à la hausse des températures annoncées ? C’est l’un des sujets sur lesquels se sont penchés les participants à la table ronde organisée à l’Abbaye Saint-Germain, sur l’avenir de la viticulture, dans le cadre de la manifestation « Fleurs de vigne ».
AUXERRE: Selon une enquête de l’INRAE (Institut National de Recherche en Agriculture, alimentation et Environnement), plus de la moitié des régions viticoles existantes pourraient ne plus être adaptées à la culture de la vigne, en cas de réchauffement climatique supérieur à deux degrés. Voire 85 % des surfaces, en cas de scénario catastrophe où la température moyenne augmenterait de quatre degrés… ! Les plus optimistes pourront toujours rétorquer qu’en revanche, d’autres régions ou pays deviendront alors plus propices à la production de vin. Mais, même si certains se sont déjà lancés dans l’aventure, comme au Mont-Saint-Michel, où poussent déjà des plants de chardonnay, ou plus loin encore, avec l’exemple de la maison de champagne Taittinger, implantée en Angleterre où elle cultive depuis six ans 49 hectares de vigne dans un pays où la bière est reine, est-on pour autant prêt à déguster et apprécier un bourgogne élaboré à Maubeuge, même si « le clair de lune » y est plus beau que nulle part ailleurs ?
L’effeuillage à proscrire dans les vignes ?
Dans l’Yonne, les acteurs de la filière viti-vinicole ont depuis longtemps pris conscience des conséquences de la hausse des températures, confrontés notamment à des vendanges de plus en plus précoces. Certaines techniques culturales comme l’effeuillage sont aujourd’hui remises en question, pour mieux protéger les raisins des rayons du soleil, comme l’explique Sophie WOILLEZ, vigneronne dans le Vézelien : « je m’étonne encore de voir des vignerons effeuiller sur la Côte de Beaune et mettre à nu leurs vignes fin juillet. Aujourd’hui, je ne prends plus du tout le risque de faire ça ou alors une semaine avant les vendanges… ».
Le pinot noir et le chardonnay, cépages ancestraux ayant bâti l’identité du vignoble bourguignon sont-ils appelés à se voir remplacer un jour par des variétés plus résistantes à la chaleur comme la syrah ? Vigneron à Saint-Bris-le-Vineux, Bruno VERRET est également président du syndicat des Bourgognes et s’interroge : « ces deux cépages représentent un peu le poids de l’Histoire pour la Bourgogne, mais en même temps il ne faut pas que ce soit un boulet ! Que cela nous coupe de la volonté de changer, entrainant l’appellation vers le bas… ». Voyant en l’aligoté un atout pour la Bourgogne : « un cépage purement bourguignon qui a souvent été décrié mais qui avec des millésimes plutôt chauds, est très intéressant et connaîtra peut-être un nouvel avenir ».
En perspective également, de nouveaux assemblages, comme avec le sacy, un cépage autrefois très répandu dans le département.
Rendre les rouges moins taniques, plus frais…
Comment avec un thermomètre qui s’emballe maintenir la typicité des vins alors que par un effet mécanique, la hausse des températures fait monter le taux de sucre des raisins et par conséquent l’alcool potentiel, entraînant de facto une diminution de leur acidité ? Journaliste au « Monde », spécialiste du vin, Laure GASPAROTTO pour sa part, mesure l’effet positif de la chose : « grâce au réchauffement climatique et au soleil, plus besoin de chaptaliser les vins comme il y a encore trente ans. Le pinot noir aujourd’hui donne des vins très riches, très ronds, c’est aussi à nous consommateurs, de nous adapter à ce que nous donne la vigne, comme notre corps s’adapte à la chaleur… ».
Voyant dans l’engouement des consommateurs pour les vins de Bourgogne en général, le fait d’une « fraîcheur » plus marquée que dans le Bordelais : « grâce à des élevages moins longs et une moindre utilisation de fûts, l’on cherche à rendre les rouges moins taniques, moins charnus, plus frais, correspondant plus à l’attente des consommateurs… »
Les vins de Bourgogne sont-ils trop chers ?
Restaurateur à Chablis, descendant d’une famille emblématique de vignerons d’Irancy, Fabien ESPANA s’insurge en faux contre cette affirmation : « on a tout en Bourgogne ! Du plus grand au plus petit, cela va de la Romanée Conti à des appellations régionales à 7 ou 8 euros. Le choix est éclectique et si un Meursault ou un Pouilly, sont effectivement très chers aujourd’hui, ils agissent comme des phares, entraînant tout vers le haut, permettant de vendre un Bourgogne 10 à 15 €, ce qui n’était pas le cas il y a encore vingt ou trente ans… ».
Et pour le producteur, l’assurance d’un juste prix récompensant le travail accompli. Avec toujours en toile de fond, l’équilibre à trouver selon les volumes récoltés, rappelle Bruno VERRET : « La Bourgogne ne sait plus stocker, on l’a bien vu avec des années comme 2017 et 2018, où tous les cours se sont effondrés… ».
Sur le même thème, Laure GASPAROTTO explique l’envolée spéculative de certains grands crus, comme « la conséquence de toutes petites récoltes, à l’instar de ce que l’on a connu en 2021. Je nous souhaite bien sûr beaucoup de vin dans les prochaines années, mais je sais aussi que cela poserait beaucoup de problèmes à certains… ».
En savoir plus
Oui le monde du vin compte de plus en plus de femmes… Et alors ! « L’avenir de la viticulture est-il féminin ? » … Mauvaise pioche pour Antonio RODRIGUEZ, journaliste à l’AFP et modérateur de la table ronde, avec cette réplique de Sophie WOILLEZ en retour : « Je déteste que l’on me pose cette question ! Pourquoi faut-il encore une fois « genrer » la profession ? Trouvant « génial » le fait que la viticulture se féminise de plus en plus, mais sans y voir de symbole particulier : « tout change et c’est tant mieux, pour autant, la femme n’est pas l’alternative pas plus que l’homme ! ». Rappelant au passage qu’il y a encore une trentaine d’années, les femmes ayant leurs règles se voyaient interdites de caves, « car cela faisait tourner les vins ! ». Laure GASPAROTTO pour sa part, témoignant d’un changement de vocabulaire dans la sphère viticole, se remémorant ses débuts de dégustatrice, lorsque l’on évoquait alors « des vins qui comme une femme, sont à réchauffer entre les mains » ou certains millésimes « qui avaient de la cuisse ! ». Un exercice sémantique qui ne rime plus avec sexiste et c’est tant mieux !
Dominique BERNERD
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