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Ce n’est pas un long fleuve tranquille : la gestion de l’eau dans l’Auxerrois suscite toujours débats et interrogations

« Le député du Rhône La France Insoumise (LFI) Gabriel AMARD était l’invité d’une réunion publique à Auxerre sur le sujet de l’eau en sa qualité de spécialiste en la matière. Fort de son expérience, il a multiplié les exemples pour démontrer les atouts que pourraient représenter pour le territoire la gestion de l’eau à un organisme public… ». « Le député du Rhône La France Insoumise (LFI) Gabriel AMARD était l’invité d’une réunion publique à Auxerre sur le sujet de l’eau en sa qualité de spécialiste en la matière. Fort de son expérience, il a multiplié les exemples pour démontrer les atouts que pourraient représenter pour le territoire la gestion de l’eau à un organisme public… ». Crédit Photos : Dominique BERNERD.

L’eau est un enjeu majeur des politiques locales. Dans l’Auxerrois, le choix d’en déléguer sa gestion à la société SUEZ pour vingt ans a depuis deux ans, suscité la colère des élus d’opposition, qui rejettent l’idée d’en confier la gouvernance au privé. Le collectif « Notr’Eau », qui rassemble des usagers de la Communauté d’agglomération privilégiant eux aussi une gestion publique de « l’or bleu », a organisé une réunion publique sur le sujet, avec comme invité, le député LFI Gabriel AMARD. Spécialiste en la matière qui, fort de son expérience, a multiplié les exemples pour démontrer les atouts que pourraient représenter pour le territoire un tel choix.

 

AUXERRE : Auxerre aura été la neuvième étape d’une tournée nationale entreprise par le député LFI du Rhône Gabriel AMARD pour défendre la gestion publique de l’eau. Un sujet qui est loin d’être anodin quand on sait qu’en métropole, plus de 430 000 personnes n’ont toujours pas accès à une eau potable sécurisée, qu’elle est aujourd’hui rationnée quasi quotidiennement, dans des départements d’Outre-mer comme Mayotte ou la Guadeloupe et que près d’un million de nos concitoyens n’ont pas accès à des sanitaires de qualité. Droit fondamental pour les uns, marchandise pour les autres, l’eau, ce « commun du vivant », comme l’appelle l’ancien maire de Viry-Châtillon, est au fil des années devenue l’objet de toutes les convoitises et par sa raréfaction, le défi majeur des générations futures.

 

« A Auxerre, on vous fait passer des vessies pour des lanternes en vous faisant croire que le sens de l’histoire, c’est d’avoir signé en 2023 un contrat pendant vingt ans avec SUEZ ! Le modèle français historique de notre patrie républicaine, c’est la régie publique communale, cela n’a jamais été SUEZ ou VEOLIA… ». S’appuyant sur des données chiffrées, le commentaire du député LFI est sans appel : « en 2010, la France comptait 34 000 services d’eau et d’assainissements, pour 12 400 contrats de délégation confiés au privé. Aujourd’hui, ils ne représentent plus que 6 380 contrats… ». Un mouvement de fond privilégiant la gestion publique et locale qui s’est accéléré ces quinze dernières années, particulièrement, dans les plus petites communes, mais également dans les grandes métropoles, à l’image de Nice, Lyon, Paris ou Avignon, toutes repassées en régie publique : « c’est pour dire que tout le monde peut y venir pour des raisons différentes. A Nice, Christian ESTROSI a fait une régie publique, il n’y est sans doute pas venu pour les mêmes raisons que moi… ».

 

Pas besoin de sortir de polytechnique pour comprendre le système !

 

Pour étayer son discours, Gabriel AMARD a brossé un argumentaire explicite, ironisant au passage sur le choix de la gestion de l’eau par le privé, décidé par la majorité communautaire : « ils prétendent qu’il savent tout et que ce sont de bons gestionnaires, là où vous ne seriez dans le meilleur des cas que des illuminés, voire des « bolcheviks », adeptes de je ne sais quel « gosplan » d’un monde révolu et passé, comme si budgéter les choses, les planifier en annuité budgétaire, c’était du stalinisme ! ». (Sic)

Les exemples cités par l’ancien compagnon de route du Parti socialiste, en faveur d’une régie publique, à ses yeux plus efficace et moins dispendieuse dans sa gestion de l’eau, sont multiples, à commencer par le montant de la masse salariale répercutée sur les factures : « avec le public, vous ne payez que les emplois se consacrant avec compétence pour que vous ayez une eau de qualité, là où dans le privé, sont inclus les salaires de directeurs commerciaux et régionaux… ». Selon les règles de comptabilité publique en vigueur, « il n’y a pas non plus de remontées financières vers une maison mère, pas d’impôts locaux, pas d’impôt sur les sociétés… ».

 

 

Chaque centime payé en régie publique et non dépensé, étant affecté au budget de l’année suivante. Dernier argument et pas des moindres, les investissements, dont les opérateurs privés privilégieraient le remboursement en un temps plus rapide que dans le public : « et ce, afin de s’en faire rembourser avant la fin du contrat. Je dis que c’est de la mauvaise gestion, contrairement aux règles de comptabilité publique amorties financièrement sur de longues durées. Si vous faites 10 millions d’investissements, ils coûteront moins cher au mètre cube chaque année si vous les payez en 30 ou 50 ans selon la nature de l’investissement, que si vous devez les rembourser en 10 ou 5 ans, il n’y a pas besoin de sortir de polytechnique pour comprendre ça ! ».

 

 

Plus de contrôle pour l’eau au robinet !

 

Quid du prix de l’eau ? Le député du Rhône milite en faveur de conditions tarifaires différenciées selon l’usage que l’on en fait, ainsi que pour la gratuité des premiers mètres cube indispensables à la survie : « est-ce que l’eau concourant à un chiffre d’affaires permettant à certains de faire du business est l’égale de l’eau dans la cuisine ou la salle de bain du domicile principal, je pense que non… ». Et d’ailleurs, le Conseil d’Etat dans sa grande sagesse, a déjà pris des dispositions en ce sens, différenciant plusieurs catégories de tarifs, à commencer par ceux s’appliquant à une résidence principale ou secondaire.

Une différenciation qu’en sa qualité de législateur, il souhaiterait voir appliquée aux industriels et au monde agricole : « je n’accepte pas que la redevance pour prélèvement d’eau dans la nature payée par les agriculteurs, soit à zéro ! Que celle payée par les industriels, le soit à des taux très bas. Aujourd’hui, la pollution non domestique est à 90 % générée par « l’agriculture industrielle », mais qui paie la dépollution ? A 70 ou 80 %, ce sont les usagers domestiques ! Il y a urgence à ce qu’il y ait un rééquilibrage et que grâce à une redevance déplafonnée, on puisse lever des moyens pour cela et c’est à la loi de finances de le prévoir… ».  En réponse à une remarque sur le prix de l’eau multiplié par quinze en cinquante ans, là où le salaire médian l’a été par dix, Gabriel AMARD s’est voulu pragmatique, prônant une pédagogie citoyenne : « il faut rappeler que même multiplié par quinze, le prix de l’eau au mètre cube est à cinq, voire deux euros, là où l’achat en bouteille vous coûtera de 300 à 1 000 euros le mètre cube ! Trop de gens pensent que l’eau en bouteille ne comporte pas de polluants. On est tous dans le même jardin planétaire, mais l’eau la plus contrôlée aujourd’hui, c’est celle du robinet, pas celle de l’eau en plastique ! ».

A un an des prochaines municipales, le message de conclusion ne pouvait être bien sûr, que politique : « nous sommes en 2025 et le sujet de l’eau va être au cœur des politiques locales, s’il vous plaît, ne faites pas de ce « commun du vivant » un sujet à la marge ! Je n’ai d’autre conclusion à vous dire que s’il y en a qui ont été à ce point « scélérats » pour signer en 2023 un contrat les faisant repartir pour vingt ans avec SUEZ, je vous abjure, remplacez- les… ! ».

Un message qui à entendre nombre de personnes présentes, en la salle Anna de la Maison Paul-Bert, « coulait de source », il va sans dire !

 

Dominique BERNERD