La montagne a donc accouché d’une souris. Un minuscule rongeur, bien sage et inoffensif qui a disparu dans un infime interstice du…Palais Bourbon pour ne plus réapparaitre de sitôt ?! Beaucoup l’espèrent, en vain !
Tout ça pour ça, in fine ! Quinze jours de palabres inutiles, de calembredaines à n’en plus finir, d’invectives pitoyables et d’insultes loufoques à qui mieux mieux, de noms d’oiseaux et de fausses crises de nerf pour arriver au dénouement inattendu d’une tragicomédie qui ne fait rire plus personne dans l’Hexagone : le texte du projet de réforme des retraites n’a pas été voté à l’Assemblée nationale !
Pire, à minuit tapante, puisque tel était le verdict de cet examen de projet législatif saupoudré du syndrome de Cendrillon et de sa fameuse citrouille temporelle devant disparaître des radars, le fameux article sept, celui relatif à l’âge de départ à 64 ans, tant contesté depuis plusieurs semaines par des millions de Français qui battent le pavé dans les rues de l’Hexagone, n’a pu être abordé légitimement lors de ces échanges si « instructifs », traduisant la pauvreté, la médiocrité et la stérilité des débats proposés dans l’hémicycle.
Un semblant de démocratie dont se souviendront longtemps les électeurs de ce pays ô combien cocardier et fiers de l’être. Et ce, dès les prochaines échéances électorales à venir ?
Une France coupée en deux : celle de la rue qui travaille et celle qui légifère…
Quinze jours à peine pour examiner un projet de réforme aussi fondamental que celui-ci que rejettent pourtant 71 % de nos concitoyens, y compris une large frange de retraités. Ne parlons pas des cadres, des indépendants, des professions libérales, des étudiants, des artisans, des commerçants, des représentants de la société civile, des fonctionnaires qui ont décidé de faire cause commune dans ce combat idéologique aux côtés des ouvriers, des employés, des enseignants et de leurs syndicats !
A croire que la fracture sociale entre une France coupée en deux – celle au faite de la situation puisque la vivant et la subissant au quotidien dans le monde du travail – et celle devant la légiférer sous les ors du Palais Bourbon est bien réelle !
La déception est immense quant à la nature de ces retrouvailles parlementaires et des débats constructifs qui doivent y être associés qui aura achoppé tristement sur l’examen des articles principaux de ce texte.
D’ailleurs, sitôt le couperet tombé à l’heure dite, vendredi soir à minuit, les têtes de file du syndicalisme à la française n’ont guère tardé à réagir et à montrer leur désappointement, à défaut leur colère.
A commencer par le patron de la CFDT, Laurent BERGER : il ne s’est pas fait prier pour mettre les pieds dans le plat de la protestation, criant au scandale et à la honte après une telle tartufferie qui n’aurait pas déplu au sieur Molière et à ses inspirations pamphlétaires.
Fustigeant l’attitude des députés, le responsable de la CFDT a jeté l’anathème sur les parlementaires de toute obédience qui, selon lui, « n’ont pas pris en considération les demandes répétées des Français au cours des différentes manifestations publiques orchestrées depuis le début de l’année en France… ».
En sus, la séance de vendredi soir devait se terminer dans une confusion totale, un brouhaha chaotique insupportable, un capharnaüm indescriptible que même nos chères têtes blondes de niveau de la maternelle n’oseraient pratiquer dans leur cour d’école car réprimandés par le regard sévère de leur maîtresse !
Seul point positif après une dizaine de jours de débat : le timing y mettant un terme !
Pendant ce temps-là, les Français actifs et les retraités qui comptent beaucoup sur la revalorisation de leurs pensions à 1 200 euros brut mensuelles sont « gros Jean comme devant », en bons spectateurs groggys qu’ils sont de la chose publique.
Le seul point positif de cette dizaine de jours de débats insipides et entravés par des milliers d’amendements à la pelle, déposés par les élus zélés de la NUPES dans le seul but de faire obstruction et barrage à toutes discussions intelligibles, aura été le respect du timing stricto sensu de l’examen du projet de réforme, imposé par la Constitution à la seconde près, soit minuit pile ! C’est tout dire !
Toutefois, peut-on raisonnablement être sérieux, du côté du gouvernement, en accordant aussi peu de délai aux parlementaires du Palais Bourbon pour débattre en leur âme et conscience du bien-fondé de ces différents articles prévus par ce texte, ayant une incidence aussi considérable sur l’existence de la majorité des Français ?
Pas sérieux s’abstenir, aurait-on dû placarder dans la salle des «pas perdus » de l’édifice étatique menant à l’hémicycle ! Juste à côté de la pancarte, « le 49.3, c’est pour bientôt ! ».
Seuls deux articles de ce projet de réforme dont celui se rapportant à « l’index senior » devant s’appliquer aux entreprises non coopératives envers les quinquagénaires et les sexagénaires, qui par ailleurs a été proprement rejeté par l’Assemblée à la stupéfaction de la majorité présidentielle, auront été examinés par l’auditoire parlementaire.
Le plus important d’entre eux, nous l’avons dit, celui de l’âge de départ à 64 ans, n’a pu être débattu publiquement et s’en va ainsi comme une lettre à La Poste – sans le timbre rouge pour ne pas aller trop vite ! – vers le Sénat qui, dans sa grande mansuétude, va prendre le relais de son examen avec davantage de sagesse et de discernement ? On ne peut que l’espérer !
Reste que l’image désolante renvoyée par cette Assemblée nationale en ébullition n’est pas digne de la démocratie et du respect de ses valeurs. Ni envers ces citoyens, ces millions de Françaises et de Français qui ont pour la plupart la tête sur le billot dans l’attente de connaître enfin leur triste sort et savoir à quelle sauce ils seront finalement mangés entre un départ à la retraite de plus en plus tardif, des pensions qui s’amenuisent, des salaires en berne, une inflation galopante, une paupérisation accrue, une flambée des prix persistante, une progression des injustices, une fracture sociale devenant abyssale…La liste n’est pas limitative !
Des Français, lassés mais aussi en colère par ce spectacle parlementaire indigeste et saugrenu, bien loin de la réalité du terrain et dépités devant ces énièmes bagarres politiciennes de chiffonniers en col blanc et en pulls qui ne les font même plus rire…Pathétique !
Thierry BRET