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Le silence n’est plus la vertu cardinale pour l’Eglise : l’institution se doit de prendre des mesures radicales…

« Il ne suffit plus de prier pour absoudre ses fautes, le temps de la repentance par l’aveu et l’action, peut-être sous le prisme de la psychologie et de la thérapie, s’ouvre enfin dans le monde ecclésiastique. Le pape François vient de démontrer à l’issue de la grande conférence épiscopale de Rome une très nette inflexion à ne plus cautionner les crimes et silences impunis depuis des années en matière de pédophilie… ». « Il ne suffit plus de prier pour absoudre ses fautes, le temps de la repentance par l’aveu et l’action, peut-être sous le prisme de la psychologie et de la thérapie, s’ouvre enfin dans le monde ecclésiastique. Le pape François vient de démontrer à l’issue de la grande conférence épiscopale de Rome une très nette inflexion à ne plus cautionner les crimes et silences impunis depuis des années en matière de pédophilie… ». Crédit Photo : D.R.

Depuis plusieurs mois, la monde médiatique est en ébullition et se fait l’écho des affaires de pédophilie qui enflent au sein de l’Eglise catholique, apostolique et romaine dans le monde occidental. Les victimes ont parlé et le couvercle a sauté. Dans cette affaire sinistre, il convient de distinguer la question de la pédophilie et celle de la non-dénonciation de ce crime abject…Deux éléments bien différents, en vérité…

TRIBUNE : Parlons de la pédophilie d’abord. Elle est aussi vieille que le monde. C’est d’ailleurs un mot grec. Faisons donc un saut en arrière de vingt-cinq siècles et relisons « Le Banquet » de Platon où l’amour des jeunes gens est abordé sans complexes : « Ceux qui se réclament de l’Aphrodite populaire aiment les femmes aussi bien que les hommes et les jeunes garçons. Ils aiment le corps plus que l’âme. Ceux qui se rattachent à l’Aphrodite céleste n’aiment que les hommes parce qu’ils ont plus de vigueur et d’intelligence que les femmes, (je suis obligé de citer le texte de Platon in extenso !). Ils n’aiment les jeunes garçons que lorsqu’ils commencent à être intelligents. Ils préfèrent leurs âmes à leurs corps. (…) Chaque ancienne moitié recherche désormais sa moitié complémentaire, d’où les trois formes d’amour possible : homme-femme, homme-homme, femme-femme. Pour ceux qui s’arrêtent aux apparences, Socrate est celui qui recherche les jeunes gens. Ceux qui sont plus perspicaces ne manqueront pas de se demander plutôt pourquoi Socrate retient les jeunes gens. Ils comprendront alors que Socrate « figure » (au sens rhétorique) tout ce qu’on recherche dans la quête amoureuse… ».  Un peu plus loin, Platon pose la question suivante : « Le précepteur doit-il être également l’amant de son élève ? ».

Ainsi, dans le monde grec, l’amour pour les jeunes gens, voire les jeunes garçons, était chose naturelle. Mais, ce qui apparaissait comme normal à cette époque ne l’est plus aujourd’hui. La pédophilie est devenue un crime pour les adultes qui la pratiquent, et une blessure indélébile qui ne se referme pas pour ceux qui l’ont subie…

L’expérience, la somme des erreurs que l’on a commises…

Ensuite, il convient de dire qu’associer la pédophilie au célibat, en l’occurrence à celui des prêtres, est une grave erreur. Dans quelques pays d’Asie, notamment au Cambodge et en Thaïlande, et dans une certaine ville d’Afrique du Nord ainsi qu’à Cuba du temps du dictateur Batista et de nouveau lors de l’ouverture au tourisme amorcé par Fidel Castro, la pédophilie ou, plutôt, le marché de la pédophilie pour étrangers, a fleuri.

J’en ai été le témoin à La Havane en 1996. Cuba ne vendant plus ses cannes à sucre aux Russes a recommencé de commercialiser des filles de tout âge et de jeunes garçons aux touristes… Puis, conscient que le pays avait ouvert les portes de Pandore au n’importe quoi, le gouvernement cubain a remis de l’ordre. Attirer des devises, oui ! La démocratisation de la prostitution à outrance, non ! La vente des enfants cubains à des occidentaux dépravés ne s’inscrit plus parmi les priorités de la ligne politique du parti au pouvoir.

La pédophilie demeure une tare inéluctable de l’espèce humaine. Et, l’on n’en sera pas quitte pour autant avec cette grande lessive médiatique. La question qui se pose désormais est simple mais implacable : comment faire pour que cela ne se reproduise plus ?

« L’expérience, disait Oscar Wilde, c’est la somme des erreurs que l’on a commises ». Mais, a ajouté un jour le directeur général de mon entreprise, « que l’on n’a pas le droit de refaire… ». Pour cela, il me semble que deux mesures simples mais rigoureuses doivent être prises au sein de l’Eglise : la première consiste à mettre en place un réseau de psychologues au service du clergé en invitant tout religieux qui détecte en lui-même une tendance à la pédophilie à prendre contact avec l’un de ces praticiens. La deuxième mesure réside dans la rédaction d’une charte précisant les actions qui doivent être prises à tous les niveaux de la hiérarchie dès qu’un soupçon de pédophilie se fait jour dans l’une des branches de cette vénérable institution séculaire.

On pourrait confier à l’Ordre des jésuites la mission de créer le réseau de psychologues, d’en assurer le suivi et d’élaborer la charte. La psychologie et l’énergie ont été leurs attributs principaux depuis six siècles.

Prenez connaissance de l’histoire des « Réductions » en Amérique latine où ils furent les seuls au cours de la colonisation à défendre énergiquement les indigènes… et lisez le livre de Jean Lacouture, « Les Jésuites ».

D’ailleurs, peut-être avez-vous entendu dire qu’ils viennent de placer l’un des leurs à Rome, à la tête de l’Eglise catholique, apostolique et romaine ! Signe des temps d’une évolution favorable au retour de la morale ?

Emmanuel RACINE