« Pas de quoi en faire un fromage » diront certains. Et pourtant, ce n’est pas tous les jours qu’un concours de cette envergure se déroule dans l’Yonne. Qui plus est, sous les voûtes d’une « vieille dame » née au Ve siècle, joyau du paysage auxerrois. On a connu pire comme « boîte » à fromages ! Un concours qui aura su mettre en valeur et récompenser le savoir-faire de tous ces artisans du quotidien qui contribuent à la sauvegarde d’un patrimoine gastronomique sans pareil, couronné par une organisation sans faille, grâce notamment à toutes les « petites mains » de la Chambre d’agriculture de l’Yonne, à la manœuvre dès les premières heures de la matinée.
AUXERRE : Nul doute que Saint-Germain a du se retourner dans son tombeau, peu coutumier de se réveiller sous les saveurs olfactives fleurant bon la vache laitière et le fromage de chèvre ! Sur les tables, pas moins de 220 échantillons venus des quatre départements bourguignons, parmi lesquels 69 icaunais issus de 19 producteurs, répartis en 22 catégories dont une majorité de chèvres déclinés sous toutes les formes, du lactique frais à la pâte pressée, en passant par le mi-sec, l’affiné ou le cendré…
Parmi les 85 jurés, ayant la lourde tâche d’officier, Jean-Michel, un habitué des concours, venu de Seine-et-Marne, mais dont le fromage préféré est le « clacbitou », un fromage de chèvre à la forme dodue, cousin du « Charolais » et originaire du Morvan. Au fil du temps, ce passionné s’est forgé quelques règles : « un fromage doit bien se tenir et ne pas couler, quelque soit son type. Couler est un défaut majeur… ». Il regrette que les jeunes générations privilégient une autre forme de dégustation : « aujourd’hui, les jeunes l’utilisent surtout en cuisine, oubliant d’apprécier le fromage avec du pain comme on a appris à le faire et c’est dommage… ».
Un concours, placé sous la présidence prestigieuse de Virginie DUBOIS-DHORNE. Sacrée championne du monde des fromagers en 2021, la Française est à ce jour la seule tricolore à avoir décroché une telle distinction. Et pourtant, rien ne prédisposait cette thésarde en littérature allemande à « tomber dans le fromage ». Cupidon est passé par là. Elle a depuis suivi son affineur de mari dans l’aventure, bien impliquée aujourd’hui dans l’entreprise familiale basée au cœur même de l’ancienne citadelle d’Arras, devenue au fil du temps « la » référence en matière de fromages dans toute l’agglomération lilloise.
Souriante, avenante et sympathique, la présidente du jour a adressé ces quelques conseils aux jurés à l’ouverture du concours, évoquant les producteurs en lice : « certains fromages peuvent présenter un défaut à la base, mais il faut les encourager et ne pas être trop radical dans vos jugements car c’est leur travail que vous jugez. Ce sont des gens passionnés qui bossent comme des dingues, pour essayer de nous faire plaisir… ».
Au final, ce sont 143 médailles qui ont été décernées dont 52 pour le seul département de l’Yonne, parmi lesquelles 15 en or, 19 d’argent et 18 de bronze.
Dominique BERNERD