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Gouvernance : la comptine des marionnettes se confirme, trois petits tours et puis s’en vont !

« Le départ inopiné de certains ministres intrigue et interroge sur leur engagement et sens profond de la mission à accomplir. La dernière en date, Agnès BUZYN, ministre de la Santé et des Affaires sociales, a fait savoir par voie de presse ses desiderata de vouloir briguer un poste aux européennes ce qui de facto ne serait pas compatible avec la fonction qu’elle occupe actuellement. Un choix de carrière politique plutôt que d’accomplissement de la fonction et de la feuille de route fixée au préalable par Matignon ? Justifiant la théorie de la fameuse comptine : trois petits tours et puis s’en vont ? ». « Le départ inopiné de certains ministres intrigue et interroge sur leur engagement et sens profond de la mission à accomplir. La dernière en date, Agnès BUZYN, ministre de la Santé et des Affaires sociales, a fait savoir par voie de presse ses desiderata de vouloir briguer un poste aux européennes ce qui de facto ne serait pas compatible avec la fonction qu’elle occupe actuellement. Un choix de carrière politique plutôt que d’accomplissement de la fonction et de la feuille de route fixée au préalable par Matignon ? Justifiant la théorie de la fameuse comptine : trois petits tours et puis s’en vont ? ». Crédit Photo : D.R.

La civilisation, c’est la maîtrise de soi et la continuité dans l’effort. Mais, de nos jours, c’est plutôt à l’instar de la fameuse comptine « trois petits tours et puis s’en vont … » ! Dans une presse économique bien connue, il a été annoncé que la ministre de la Santé et des Affaires sociales, Agnès BUZYN, envisageait d’être candidate aux élections européennes. La passe de trois, pourrait-on dire ! Après Nicolas HULOT, ministre de l’Ecologie qui devait démissionner au bout d’un an et Gérard COLLOMB, ministre de l’Intérieur qui a rendu son tablier dix-huit mois après sa nomination, c’est désormais le tour de Madame la ministre de la Santé de revoir sa copie initiale et d’envisager une honorable porte de sortie électorale. Mais quid de ses engagements ?

TRIBUNE : Si Nicolas HULOT s’est éloigné du gouvernement pour d’obscures raisons pseudo environnementales, Gérard COLLOMB, lui, a démissionné pour retrouver son confortable fauteuil d’édile à Lyon. Mais, avant de quitter son ministère, il a pris soin de préciser que « la situation était explosive dans ce qu’on appelle les quartiers… ». Un constat alarmant, certes, qui ne l’a pas empêché néanmoins de quitter le navire sur lequel il était embarqué. En d’autres temps, moins mémorables, on aurait employé un mot beaucoup plus acerbe pour qualifier ce type de comportement : la désertion.

Maintenant, c’est Agnès BUZYN qui possède des velléités de poudre d’escampette avant que les grandes réformes autour de la santé et de la retraite ne surviennent. L’actuelle ministre veut profiter d’une belle opportunité au Parlement européen où, le moins que l’on puisse dire, ce n’est pas une tâche stakhanoviste qui l’attend. Chacun sait que les parlementaires européens ne risquent pas « le burn-out » par leur omniprésence !

Nos ministres appliquent avec constance cette ritournelle que l’on chantait autrefois aux enfants : « les petites marionnettes, trois petits tours et puis s’en vont… ». Ancien ministre de l’Economie, Hervé GAYMARD, raconta à qui voulait l’entendre cette anecdote significative de cet état d’esprit, venant lui-même d’être pourvu de son maroquin. Il rencontra son homologue allemand qui lui dit tout de go : « Oh toi, tu es le sixième ministre de l’Economie que je croise en huit ans ! ».

L’opinion ironique de nos voisins allemands…

En entendant cette réflexion pertinente et cocasse, on comprend mieux cette remarque d’Alfred GROSSER sur l’amitié entre nos deux peuples : « Les Français n’aiment pas les Allemands mais les respectent. Les Allemands aiment les Français mais ne les respectent pas... ». Comment peut-on être respecté au fond quand on fait preuve d’une telle versatilité au niveau de son comportement et de son implication ?

L’écologie, la sécurité et la santé constituent des défis majeurs pour notre pays. Et que font les ministres en charge de ces postes-clés ? Ils en profitent pour partir et orienter leur propre carrière politique.

Il y a quelques mois, nous avons commémoré la victoire de 1918. Une conquête sur les forces belliqueuses qui a été acquise au prix d’un effort surhumain, avec huit millions de Français ayant subi avec beaucoup d’abnégation des conditions de vie épouvantables pendant quatre ans. Un des nombreux écrivains-héros de cette guerre, Roger VERCEL, faisait dire à l’un de ses personnages, un héros également, lorsqu’on parle d’un déserteur : « Les poilus indulgents pour les défaillances étaient intransigeants sur la question de la désertion... ».

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Comment va-t-on pouvoir mettre en œuvre les réformes indispensables à notre pays et sa survie si les ministres donnent l’exemple de ne point s’y intéresser et de quitter le vaisseau de la gouvernance déjà si complexe à manœuvrer ?

Le trou de la sécurité sociale est récurrent depuis des décennies. Pour tenter de le combler, Michel ROCARD, alors Premier ministre, a créé la CSG (Contribution sociale généralisée) en 1991. Son taux était de 1,1 % au départ. Puis,  Alain JUPPE, l’un de ses successeurs, a imaginé à son tour un expédient, la CRDS, applicable au taux de 0,5 %, et la Caisse d’amortissement de la dette sociale où l’on jetait les déficits de la Sécurité Sociale, autrement dit, « le trou dans le trou ».

Cinq ans d’implication et d’assiduité à son poste ne sont pas de trop…

Fin 2017, la dette sociale accumulée depuis la création de la CADES s’élevait à 139,5 milliards d’euros. Actuellement, le taux des prélèvements sociaux atteint 17,20 %. Etonnez-vous, après de tels coups de butoir répétitifs au plan de la fiscalité, que les gens expriment leur ras-le-bol et descendent dans la rue, revêtus de gilets jaunes ou pas !

Chacun sait que la santé est un immense défi pour notre pays. Du fait de la démographie galopante, avec l’allongement de l’espérance de vie et le nombre croissant de personnes âgées de plus de 62 ans qui vivent dans l’hexagone. Ce qui induit de facto que les dépenses de santé sont de plus en plus importantes.

À cela s’ajoute le problème lancinant de la désertification médicale des territoires. Il ne s’agit plus de recourir à des expédients quelconques comme augmenter indéfiniment les prélèvements sociaux pour résoudre la problématique. Mais d’étudier méthodiquement les mesures nécessaires à mettre en œuvre et d’organiser la concertation avec toutes les parties prenantes, pour que cette réforme sanitaire soit viable.

Pour cela, un delta de cinq ans d’implication et d’assiduité n’est pas de trop pour l’occupant du ministère de la santé. Or, Agnès BUZYN a fait savoir qu’elle préférait le chant des sirènes d’un mandat européen, moins de deux ans après avoir été nommée à ce poste capital plutôt que de poursuivre jusqu’au bout sa mission !

Les Poilus ont su gagner la Première Guerre mondiale au prix de sacrifices monstrueux. Est-ce avec des ministres qui ne sentent guère impliqués que l’on va relever le défi du troisième conflit mondial qui se joue depuis plusieurs années avec la mondialisation ?

Emmanuel RACINE