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Le Département favorable à la fermeture du collège Bienvenu Martin : à vous de décider, Monsieur le préfet !

« Le temps des décomptes est arrivé pour enterrer définitivement le dossier du maintien ou de la fermeture du collège Bienvenu Martin à Auxerre. Avec 31 voix positives en sa faveur, le président du Département Patrick GENDRAUD (à droite) peut saisir le préfet de l’Yonne, le seul qui devra trancher ce nœud gordien perdurant depuis tant d’années… ». « Le temps des décomptes est arrivé pour enterrer définitivement le dossier du maintien ou de la fermeture du collège Bienvenu Martin à Auxerre. Avec 31 voix positives en sa faveur, le président du Département Patrick GENDRAUD (à droite) peut saisir le préfet de l’Yonne, le seul qui devra trancher ce nœud gordien perdurant depuis tant d’années… ». Crédit Photos : Thierry BRET.

La messe semble être dite dans l’interminable série, longue de quatre années de tergiversation, mettant en scène le devenir de l’établissement scolaire auxerrois. Par 31 voix pour et après des échanges nourris à la consistance parfois politicienne, le Conseil départemental de l’Yonne a rendu son verdict. Il est favorable à la clôture définitive des activités pédagogiques enseignées sur ce site. Erigé dans les années 70, le bâti était de conception « Pailleron ». Plébiscité par sa majorité, malgré neuf oppositions et deux abstentions, le président de l’exécutif icaunais Patrick GENDRAUD dispose de toute la latitude pour présenter une saisine au représentant de l’Etat. C’est le préfet Patrice LATRON qui in fine se prononcera sur l’acceptation ou le rejet de cette décision…

AUXERRE : Net et sans bavure, le vote de la délibération débattue ce vendredi matin dans l’hémicycle du Département ? Pas tout à fait, en vérité. Certes, le président de la vénérable institution a obtenu gain de cause en faisant montre d’équité et de démocratie auprès de son auditoire, tout recueillant au terme de cette séance trente-et-une voix salvatrices au passage.

Mais, les échanges parfois courroucés et vindicatifs des intervenants de l’opposition (ils étaient dans leur rôle) auront quelque peu brouillé les pistes. D’ailleurs, celles-ci furent souvent aux antipodes du sujet de prédilection du jour, soit la pérennité de ce collège Bienvenu Martin qui n’en finit plus d’agoniser depuis quatre ans.

S’invitant à la frontière de la pure stratégie politicienne, renvoyant les alliés d’hier en de farouches opposants d’aujourd’hui, le débat engagé par l’assistance institutionnelle en aura surpris plus d’un. A commencer par les rares spectateurs qui, silencieux à l’arrière-ban, purent constater un peu médusés les incidences contradictoires de ces joutes verbales soutenues.

S’il y avait un mot à graver dans le marbre à l’issue de la session, ce serait celui-ci : cohérence. Il a été l’un des credo moteur de cette matinée fébrile, en interventions à géométrie variable. Ce terme aura été prononcé à maintes reprises par le président Patrick GENDRAUD. On le trouvera aussi dans les propos tenus par le nouveau groupe des Indépendants, constitué de Delphine GREMY, Xavier COURTOIS et Mahfoud AOMAR. Evidemment, avec un effet miroir dans le sens et l’interprétation !

Pourtant, le premier à dégainer fut comme à l’accoutumée le représentant du Parti socialiste, Nicolas SORET. Le président de la CC du JOVINIEN ne pouvait que regretter « qu’il n’y ait pas une vision plus claire sur la stratégie globale en matière d’éducation sur le territoire ». Puis, de renchérir : « la majorité va passer en bulldozer et faciliter la création d’une friche en lieu et place de l’établissement ».

Admiratif de la gestion de tacticien du président de l’exécutif, Nicolas SORET, un brin ironique, aurait aimé avoir eu connaissance du rapport d’expertise après les dégradations survenues dans le collège d’Auxerre.

Puis, l’air martial, l’orateur convaincu que cette fermeture est synonyme de catastrophe interpela Patrick GENDRAUD : « Vous précisez dans la presse locale que vous n’avez pas les clés pour lutter contre l’expansion du Rassemblement national. Je vous répondrai que l’une de ces clés est précisément l’éducation et le maintien des collèges ! ».

Une première banderille qui eut pour effet de déclencher une bronca dans l’assistance départementale. « Je voterai contre cette délibération, conclut l’ex-premier secrétaire général du PS 89, fermer ce collège représente une balafre dans votre mandat… ».

 

 

L’assaut du groupe des indépendants et des opposants traditionnels…

 

Stoïque, le président du Conseil icaunais ne pipa mot, tout en prenant des notes qui feraient office de réponses appropriées un peu plus tard. L’estocade suivante vint de Mahfoud AOMAR. « Les décisions sont prises pour certains territoires et pas pour d’autres, clama-t-il, c’est arbitraire et c’est le signe d’un manque de courage flagrant ! ». Contre le projet de fermeture, le dernier élu arrivé dans l’hémicycle entraîne dans son sillage ses deux coreligionnaires Delphine GREMY et Xavier COURTOIS, qui forment aujourd’hui une nouvelle opposition au pouvoir en place.

Yves VECTEN y alla également de sa tirade : « c’est un aveu d’échec que de supprimer ce collège. Derrière cela, il faut y voir en filigrane la suppression du département. C’est une mise en garde… ».

Après ce premier tour de table, Patrick GENDRAUD se voulut rassurant. D’abord sur la friche hypothétique qui pourrait subsister après la fermeture du site : « il est certain que si le vote de fermeture est validé à l’issue de cette séance et que le préfet de l’Yonne suive cette volonté, il n’y aura pas de friche en l’état. Après la démolition du bâtiment, nous trouverons un acquéreur afin d’ériger un nouvel espace portant les valeurs de la République in situ… ».

On n’en saura pas davantage sur les intentions du président. Ce dernier donna ensuite des explicatifs sur l’avis de consultation émis par le Conseil départemental de l’Education nationale (CDEN). Dix personnes se sont prononcées contre la fermeture (des représentants syndicaux pour la plupart), six ont approuvé le projet.

« Je suis très clair dans mes arguments, poursuivit Patrick GENDRAUD, je n’oppose pas la ville qui possède cinq collèges à la ruralité. Les enfants de Bienvenu Martin ont été répartis dans d’autres établissements distants d’un kilomètre et de neuf cents mètres, avec le bénéfice de transports urbains : ce n’est tout de même pas catastrophique alors que d’autres jeunes en zones rurales accumulent des temps de trajets de près de deux heures au quotidien passés dans les bus ! ».

Puis, réemployant le mot du jour (la cohérence), l’ancien maire de Chablis invita tout particulièrement deux des membres du groupe des Indépendants à en user et abuser. Xavier COURTOIS et Delphine GREMY s’étaient prononcés contre la tenue de travaux le 12 avril alors qu’ils appartenaient encore à la majorité gouvernementale. Depuis, les choses se sont inversées…

Quant au mutisme du député de la seconde circonscription, André VILLIERS, il vola soudainement en éclat au beau milieu de ces conciliabules animés.

« C’est la recherche de préconisations économiques qui explique l’orientation que nous avons suivi, devait-il préciser, Patrick GENDRAUD continue d’appliquer une politique qui ne devait pas changer d’orientation. Toutefois, j’attire votre attention sur le fait qu’il ne faut pas toucher au service de l’éducation dans le département. Le courage commence ici : lorsque l’on prend de véritables décisions dans l’intérêt de notre territoire… ».

Délivrant un message d’encouragement au président actuel de l’assemblée icaunaise, André VILLIERS fit une incursion volontaire dans la politisation des débats. « J’attends avec impatience que soit prise une décision sur la gratuité des transports scolaires sur l’Auxerrois : c’est cela faire preuve de cohérence ! ».

 

 

« Je ne suis pas là pour évoquer ma vie ! »

 

 

Un temps de respiration intervint dans les échanges où chacun rechargea les accus avant que le président de l’Association des maires de l’Yonne, Mahfoud AOMAR, ne revienne à la charge : « Je ne savais que les compétences requises pour pouvoir agir et parler dans cette assemblée reposait sur l’ancienneté ! ». L’élu reprit le mot du jour au bond en attaquant de nouveau sa cible privilégiée, le président GENDRAUD en personne.

« Il faut être en cohérence avec soi-même, dit-il en s’adressant au perchoir, on ne peut pas dire un jour que l’on désire quitter les Républicains et claironner dans un média un peu plus tard que finalement l’on restera au sein de LR. Avoir deux discours différents n’est pas un signe de cohérence convenu. Avec moi, vous trouverez toujours quelqu’un qui ne s’exprima que par la voix de la clarté et de la vérité… ».

Visé par cette diatribe, le président balaya d’une simple chiquenaude la nouvelle flèche venant du groupe des indépendants.

« Je ne suis pas là pour raconter ma vie : je ne vais pas changer d’étiquette. J’insiste en le disant une nouvelle fois : je suis un homme libre et je le resterai à l’avenir. Ne mélangeons pas tout ! Nous ne sommes pas là pour ça ! ».

Le bras de fer se déroula encore un bon moment avec la prise de parole de Delphine GREMY. Elle affirma que le Département n’avait plus les moyens de maintenir trente-trois groupes scolaires en état pour accueillir une jauge de 14 000 élèves.

« Nous sommes conseillers départementaux avant d’être des élus cantonaux. Il serait opportun de prendre très vite des décisions globales pour fermer d’autres établissements afin de coller à nos capacités financières. Car, ce douloureux problème va bientôt revenir sur la table… ».

Quelques minutes plus tard, la délibération présentée par le Conseil départemental de l’Yonne reçut les suffrages suffisants pour son adoption. Mettant un terme définitif sur cet épineux dossier qui n’aura donc pas fait l’unanimité collégiale.

Fort de son succès, mais observant un vote réfractaire peut-être plus élevé que la normale, Patrick GENDRAUD a désormais le champ libre pour saisir le préfet de l’Yonne, Patrice LATRON, dernier rempart avant la fermeture ou le maintien d’un collège Bienvenu Martin qui aura suscité bien des passions et soulevé bien des combats.